L’operateur ensemblier, un nouveau modèle économique à la promesse de 250 000 rénovations globales par an 

Le mardi 29 mars 2022 s’est tenu le webinaire intitulé “Vers un modèle économique pour la rénovation performante : l’opérateur ensemblier, une solution au défi de la Renovation wave européenne ?”.

Organisé et introduit par Pascal Canfin, Président de la commission environnement du Parlement européen, ex-ministre de l’Environnement, cet évènement a mis en lumière un modèle permettant d’accélérer la rénovation de 250 000 maisons “passoires énergétiques” par an, permettre une économie moyenne annuelle de 2,4 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) du pays, une croissance de 0,3 % de PIB et 100 000 nouveaux emplois.

L’événement réunissait différents intervenants : Vincent Aussilloux (chef du service économie-finances de France Stratégie), Emmanuel Tuchscherer (directeur stratégie communication et solutions de neutralité carbone d’ENGIE), Jonathan Louis (ingénieur bâtiment durable à l’Ademe), Laurène Chenevat (responsable du plaidoyer de Mirova) et plus d’une centaine d’invités. L’occasion pour le groupe Hellio et par la voix de son PDG, Pierre Maillard, de défendre l’expérimentation de ce modèle prometteur face à la flambée des prix de l’énergie. Retour détaillé sur cet événement de grande qualité.

“Aujourd’hui, si des avancées immenses ont été réalisées pour structurer l’offre de rénovation énergétique auprès des ménages pour leurs logements, le compte n’y est pas encore. Ni le nombre de rénovations globales par an à réaliser, ni l’argent mis sur la table pour les financer sont suffisants. Cela demande un changement d’échelle que le modèle du conseiller MonAccompagnateurRenov’ ne pourra potentiellement pas enclencher seul. Nous sommes convaincus que la solution de l’opérateur « ensemblier” mérite d’être expérimentée en complément. Interlocuteur unique, responsable juridiquement du chantier de A à Z et dans ses règles de l’art, pré-financeur et garant de l’exécution et de l’efficacité des travaux sur la facture : c’est un nouveau modèle économique de la rénovation globale qui va plus loin.” commente Pierre Maillard, PDG du groupe Hellio.

Le contexte : l’indispensable massification des rénovations performantes des bâtiments européens

Dans son rapport de novembre 2020, le Haut Conseil pour le climat au regard des variations climatiques et des surfaces de logement, la France apparaît comme ayant les logements les moins performants par rapport à la Suède, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l’Allemagne, soit les quatre pays étudiés.

Jonathan Louis, ingénieur bâtiment durable à l’Ademe, premier intervenant du webinaire, a souligné à juste titre que seule une rénovation performante, définie légalement par la loi, est une rénovation saine, confortable, qui préserve le bâti non pathogène et qui permet d’atteindre le niveau Bâtiment Basse Consommation (BBC) [1].

On rappelle que d’ici 2050, l’ensemble du parc de logements en France (plus de 30 millions) devra être au standard « Bâtiment Basse Consommation » : tel est l’objectif fixé par la loi de Transition énergétique de 2015. Pour atteindre cet objectif, la loi prévoyait 500 000 rénovations par an au niveau basse consommation dès 2017. Or, le CLER estime que pour l’année 2018, seulement 40 000 rénovations BBC ont été réalisées, et que 250 000 rénovations ont permis une amélioration de l’étiquette énergétique.

Selon Jonathan Louis, l’opérateur ensemblier doit permettre d’amener les rénovations à un niveau BBC, et se doit de garantir une performance et une qualité des rénovations pour être un modèle à impact.

L’enjeu : un webinaire pour faire émerger la solution du modèle économique des opérateurs ensembliers 

Vincent Aussilloux, chef du service éco-fi de France Stratégie, est revenu sur la présentation du modèle des opérateurs ensembliers et leur tiers investissement, déjà présenté dans une note d’octobre 2020 [2], et que Hellio défend depuis 2 ans auprès des pouvoirs publics.

Il a ainsi défini les opérateurs ensembliers comme étant des “entreprises [qui] sont maîtres d’oeuvre et financeurs de la rénovation énergétique, qui proposent des Contrats de Performance Énergétique. Ce sont des opérateurs ensembliers qui peuvent être des entreprises privées, des fédérations d’artisans, des entreprises générales, etc.”.

Ce modèle en trois points repose sur :

  • La création d’un “guichet unique” : fonction endossée par des “opérateurs ensembliers” définis ;
  •  Des travaux préfinancés par l’opérateur, qui se rembourserait en fin de chantier sur la baisse de la facture énergétique, à hauteur de ¾ des économies générées, le dernier tiers étant au bénéfice du ménage accompagné ;
  •  L’adossement du modèle à une garantie publique pour couvrir les “risques liés à des travaux défaillants ou un défaut d’usage”. [3]

Concrètement, les opérateurs ensembliers auraient pour rôle de calculer le Diagnostic de Performance Energétique (DPE), d’évaluer la rentabilité des travaux de rénovation engagés, d’avancer la totalité des financements, de les réaliser et d’établir des Contrats de Performance Energétique (CPE).

Au regard du contexte de la hausse des prix, ce modèle sera d’autant plus rentable car le gain sur la facture sera plus important, la durée de remboursement de l’opération donc d’autant plus rapide. « Plus le coût de l’énergie est élevé, plus les économies d’énergie réalisées sont fortes, et plus la rentabilité de ce modèle va être rapide : on serait plutôt sur 1/3 des logements éligibles à ce modèle de rénovation énergétique globale «  précise Pierre Maillard.

Hellio porte le projet de l’opérateur ensemblier au sein de sa plateforme de proposition à impact sur la maîtrise de l’énergie. En effet, Hellio souhaite “expérimenter un modèle innovant d’accompagnement et de financement de la rénovation globale, dont l’efficacité est garantie” (proposition n°2) et propose, à l’échelle européenne de “consacrer le statut d’opérateur ensemblier agréé par les gouvernements des États membres dans la Directive sur la performance énergétique des bâtiments” (proposition n°38).

France Stratégie a ainsi proposé ce modèle pour pallier la défaillance des banques traditionnelles dans le financement de rénovations performantes souvent coûteuses, allant jusqu’à 90 000 euros pour une maison individuelle et plusieurs centaines de milliers d’euros pour une copropriété. Et d’autre part, pour garantir l’impact des travaux sur la facture d’énergie.

Ce modèle serait évidemment encadré par la puissance publique (l’État et les collectivités territoriales) suivant un cahier des charges rigoureux. Les opérateurs pourraient aussi bien émaner d’entreprises privées que de sociétés d’économie mixte ou de tiers-financement.

Des entreprises privées prêtes à expérimenter le modèle dès cette année : Hellio formule trois demandes auprès des pouvoirs publiques

Trois entreprises ont pris la parole pour témoigner de leur retour d’expérience sur le modèle de l’opérateur ensemblier : Pierre Maillard, PDG de Hellio, Emmanuel Tuchscherer, Directeur stratégie communication et solutions de neutralité carbone d’Engie et Laurène Chenevat, responsable du plaidoyer de Mirova.

Hellio, un des acteurs convaincus par ce modèle, a dévoilé son expertise terrain et l’intérêt à déployer ce modèle économique : standardiser, garantir l’impact des travaux, préfinancer et acter une rentabilité sur plusieurs années.

Toutefois le constat est sans appel : si des entreprises privées, de taille différente sont ainsi prêtes à expérimenter le modèle, elles ont besoin de soutien à triple titre :

“Le modèle d’opérateurs ensembliers est très prometteur, mais il ne peut pas encore fonctionner, il y a beaucoup de freins sur le terrain”, a affirmé Pierre Maillard.

● Un soutien politique car des freins réglementaires sont identifiés pour lancer l’expérimentation.

À titre d’exemple, ENGIE souhaite allonger la période des Contrats de Performance Énergétique de 16 à 20-25 ans. Autre exemple, la réglementation MonAccompagnateurRénov’ qui, si elle est publiée, impose une neutralité entre conseil et réalisation de travaux, alors que le modèle même de l’opérateur ensemblier suppose un risque compensé par une maîtrise des acteurs de travaux. Un décret “bac à sable réglementaire” dédié à l’expérimentation sera donc nécessaire ;

● Un soutien financier garantissant l’expérimentation, soit l’accès à un fonds de garantie en cas de défaillance de l’opération selon certains cas définis.

Un fonds de garantie européen pourrait être constitué et ouvert pour les opérateurs ensembliers et leurs rénovations globales préfinancées tant en maison individuelle qu’en habitat collectif ;

● Un soutien de préfinancement pour assurer une roulement financier, soit par le soutien d’un fonds ou d’une banque publique ou privée.

Pour Emmanuel Tuchscherer, le modèle de l’opérateur ensemblier n’est pas inconnu puisque ENGIE est expert des lots techniques avec, en sous-traitance, les professionnels du bâtiment.

Laurène Chenevat a quant à elle mis en avant la rentabilité de ce modèle économique sur le long terme.

Téléchargez le communiqué ci-après : Hellio_Alerte presse_webinaire Opérateur ensemblier_29032022